La Quintinie se met à l’oeuvre : il draine le terrain, établit des serres et des remblais, développe la culture en espaliers, la protège des insectes et des chenilles, et fournit à son maître les fruits qu’il préfère, y compris les melons et les figues.
Mais au-delà de la passion des jardins, évoquée de façon à la fois poétique, précise et gourmande, c'est la personnalité singulièrement attachante de « Monsieur le jardinier » qui revit dans ces pages. Témoin des splendeurs et des intrigues de la Cour, La Quintinie, homme ombrageux, vit à l'écart, mais n'hésite cependant pas à protester lorsque l'on punit trop sévèrement des voleurs de pommes. Louis XIV l'estime, lui rend visite, et lui pardonne une indépendance d'esprit qu'il ne tolérerait de personne.
Un extrait : " L'hiver n'en finissait plus. Depuis des mois, la neige et le gel rongeaient la terre. Les cloches maraîchères, le renouvellement quotidien du fumier, les lourdes toiles de serge et la bonne volonté des ouvriers étaient insuffisants à entretenir la chaleur nécessaire à la survie des germes et des premières pousses vernales. Il fallait arracher des plants entiers, sauver ce qui pouvait encore l'être. On entassait pêle-mêle dans les grandes serres les arbres en pots, les fruits, les fleurs et les légumes qui avaient survécu aux frimas.
La Quintinie s'inquiétait de ces conditions catastrophiques, non pas pour lui-même et son jardin, mais pour les paysans qui voyaient, jour après jour, leurs réserves diminuer et leurs craintes augmenter : la famine avait jeté sur les routes des hordes de miséreux qui dévastaient les maigres plantations des manouvriers, tuaient les bêtes et parfois même les hommes.
Le potager lui-même ne fut pas épargné. Une nuit, des hommes surgirent, escaladèrent les murs d'enceinte, fracturèrent des serres, dérobèrent des fruits, des légumes et des outils. Sur leur passage, ils piétinèrent et arrachèrent de nombreux plants qu'ils n'emportèrent pas."
Un avis : Le Potager du Roi a été crée dans les années 1680 dans les jardins du château de Versailles par Jean-Baptiste de la Quintinie à la demande de Louis XIV. Sa vocation était de fournir la cour du Roi de France en savoureuses variétés de fruits et légumes.
Ce récit romanesque, où l'érudition et l'imagination font bon ménage, est une leçon de sagesse aussi bien que de jardinage ou d'histoire. Superbe !
Alerte et lumineux, d'une fine élégance cle plume. .. Un délicieux divertissement rythmé par les saisons de la nature et celles de l'étiquette. Pierre Kyria, Le Monde
par Frédéric Richaud, Paris, Editions Grasset, Le Livre de Poche n° 30227 2004, 158 pages, 5 €.
Mais au-delà de la passion des jardins, évoquée de façon à la fois poétique, précise et gourmande, c'est la personnalité singulièrement attachante de « Monsieur le jardinier » qui revit dans ces pages. Témoin des splendeurs et des intrigues de la Cour, La Quintinie, homme ombrageux, vit à l'écart, mais n'hésite cependant pas à protester lorsque l'on punit trop sévèrement des voleurs de pommes. Louis XIV l'estime, lui rend visite, et lui pardonne une indépendance d'esprit qu'il ne tolérerait de personne.
Un extrait : " L'hiver n'en finissait plus. Depuis des mois, la neige et le gel rongeaient la terre. Les cloches maraîchères, le renouvellement quotidien du fumier, les lourdes toiles de serge et la bonne volonté des ouvriers étaient insuffisants à entretenir la chaleur nécessaire à la survie des germes et des premières pousses vernales. Il fallait arracher des plants entiers, sauver ce qui pouvait encore l'être. On entassait pêle-mêle dans les grandes serres les arbres en pots, les fruits, les fleurs et les légumes qui avaient survécu aux frimas.
La Quintinie s'inquiétait de ces conditions catastrophiques, non pas pour lui-même et son jardin, mais pour les paysans qui voyaient, jour après jour, leurs réserves diminuer et leurs craintes augmenter : la famine avait jeté sur les routes des hordes de miséreux qui dévastaient les maigres plantations des manouvriers, tuaient les bêtes et parfois même les hommes.
Le potager lui-même ne fut pas épargné. Une nuit, des hommes surgirent, escaladèrent les murs d'enceinte, fracturèrent des serres, dérobèrent des fruits, des légumes et des outils. Sur leur passage, ils piétinèrent et arrachèrent de nombreux plants qu'ils n'emportèrent pas."
Un avis : Le Potager du Roi a été crée dans les années 1680 dans les jardins du château de Versailles par Jean-Baptiste de la Quintinie à la demande de Louis XIV. Sa vocation était de fournir la cour du Roi de France en savoureuses variétés de fruits et légumes.
Ce récit romanesque, où l'érudition et l'imagination font bon ménage, est une leçon de sagesse aussi bien que de jardinage ou d'histoire. Superbe !
Alerte et lumineux, d'une fine élégance cle plume. .. Un délicieux divertissement rythmé par les saisons de la nature et celles de l'étiquette. Pierre Kyria, Le Monde
par Frédéric Richaud, Paris, Editions Grasset, Le Livre de Poche n° 30227 2004, 158 pages, 5 €.